Quand le Yosemite National Park brûle
Oui, c’est à prendre au pied de la lettre.
Alors que j’entre les yeux grands ouverts dans le Yosemite Park par une belle journée d’automne, une intense brume blanche s’installe. Mais une brume qui sent la fumée, c’est inquiétant. La route est balisée, il est interdit de rouler sur la voie de droite et de se parquer. Un panneau « watch for fire » est lisible sur le bord de la route. Quelques mètres plus tard, alors qu’on hésite à avancer en se demandant si tout cela est bien raisonnable, on aperçoit sur la droite un arbre dont le coeur est rouge braise. Une intense fumée se dégage de ce paysage brûlant. Au bout d’un moment – je ne saurais trop dire combien de temps, étant dans un état à la fois d’émerveillement et à la fois d’attention accrue au cas où un pin aurait décidé de me tomber dessus – le balisage s’arrête. Juste avant, un groupe de pompiers est rassemblé.
Je m’arrête, je descends et je vais les voir.
Renouveler la forêt
En Californie, mettre le feu aux parcs est monnaie courante. 45 hectares de forêt ont été intentionnellement brulés cet automne dans le parc Yosemite. Le but? Non pas de faire fuir les touristes, mais d’utiliser le feu pour restaurer l’écosystème.
Réinsérer un mécanisme naturel
« Le feu est un élément naturel de la Sierra Nevada, qui comprend le Yosemite National Park, explique Gary Wuchner, chargé de l’éducation au feu et de l’information du parc. Il a façonné les paysages de la Californie depuis des milliers d’années. Il existait avant l’arrivée des humains. Ils ont d’abord voulu l’éradiquer, puis l’ont réutilisé comme nettoyeur naturel dans les années 70. »
En l’absence de feux de forêt, la densité des espèces résistantes à l’ombre, telles que le cèdre ou le sapin blanc, a atteint des niveaux non-naturels et inacceptables, informe un panneau du parc. « Les petites espèces, comme les buissons, se sont aussi développés, ajoute le chargé de l’éducation au feu. Le problème est que leurs racines, plus petites et moins profondes que les grands pins et chênes, boivent toute l’eau et les grands arbres n’en ont plus assez. » Le feu permet également de nettoyer la forêt des arbres faibles, morts et des débris naturels.
Incendie controlé
« Dans les lieux où la foudre et le feu naturel ne sont pas idéaux, comme à proximité des habitations ou d’autres infrastructures, les professionnels vont utiliser l’incendie contrôlé, ajoute Gary Wuchner. L’incendie contrôlé est un feu de basse intensité qui a pour but d’améliorer le paysage, de prévenir les gros incendies, ainsi que de réduire la forêt envahissante par de la forêt saine et durable. Ce dernier point est très important en vue du changement climatique et des menaces qui pèsent sur le parc. »
Bonnes conditions
Le feu n’est pas déclenché sans réunir quelques conditions préalables. « La qualité de l’air est prise en compte, ainsi que le taux d’humidité », expose le spécialiste. Un permis est délivré par le district de contrôle de la pollution de l’air de Mariposa (Mariposa Country Air pollution Control District – MCAPCD), afin de s’assurer que les conditions de qualité de l’air soient suffisamment bonnes, le feu déclenchant énormément de fumée.
L’action en soi a duré une journée, la végétation a pris elle 3 à 5 jours pour brûler. Comme la pluie en cette saison, le feu et sa fumée peuvent peut-être déranger les touristes, mais ils sont essentiels à la bonne santé de la nature.